Hélène Lebon, avocat à Paris 8

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Hélène LEBON
Avocat au Barreau de Paris
 

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Arrêt du Conseil d’Etat sur les cookies : personne n’a gagné !


Par un arrêt du 16 octobre 2019, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur le recours de 2 associations à l’encontre de décisions de la CNIL portant sur les cookies et autres traceurs.

En effet, aux mois de juin et de juillet derniers la CNIL a publié sa position sur les cookies tout en laissant une période d’adaptation aux professionnels. Concrètement cette période d’adaptation permettait aux professionnels de ne pas recueillir un consentement des internautes conforme au RGPD pendant cette période de transition et de concertation.

Les associations demandaient donc au Conseil d’Etat d’enjoindre à la CNIL de publier sur son site internet l’information selon laquelle la poursuite de la navigation ne constitue pas un mode d’expression valable du consentement en matière de cookies et de traceurs en ligne.

Le Conseil d’Etat a rejeté la requête des associations, pour les motifs suivants :

-       La loi reconnait à la CNIL un large pouvoir d’appréciation, en particulier pour ce qui concerne l’exercice de son pouvoir de sanction, que ce soit pour apprécier l’opportunité d’engager des poursuites de sa propre initiative ou pour décider des suites à donner aux plaintes qu’elle peut recevoir : la CNIL pouvait donc tout à fait accorder une période d’adaptation,

-       Cette période de transition va permettre à la CNIL d’accompagner les acteurs concernés, confrontés à la nécessité de définir de nouvelles modalités pratiques de recueil du consentement : ce qui constitue également une mission de la CNIL au regard de la loi informatique et libertés,

-       La CNIL a pris la précaution de prévenir que durant cette période d’adaptation, elle continuera à contrôler le respect des règles relatives au caractère préalable du consentement par cette période d’adaptation,

-       La CNIL a également pris la précaution de préciser qu’elle pourra faire usage de son pouvoir de sanction en cas d’atteinte particulièrement grave aux règles applicables. Cependant, la CNIL n’a pas précisé ce qu’elle entendait par une atteinte particulièrement grave…

Pour les responsables de traitement la solution est relativement inconfortable puisque pendant cette période d’adaptation, ils peuvent être contrôlés et sanctionnés en cas d’atteinte particulièrement grave. S’ils décident de modifier rapidement leurs cookies et autres traceurs, ils risquent de devoir les changer ou les modifier après diffusion des résultats de ces travaux de concertation entre la CNIL et les professionnels s’il s’avère que ces cookies ne sont pas tout à fait conformes à la future position de la CNIL.

De plus, comme le rapporteur public l’avait souligné lors de l’audience, les actions judiciaires peuvent toujours être intentées, et récemment le TGI de Paris a considéré que les clauses d’une cookies policy étaient contraires à la loi.

Le juge européen s’est d’ailleurs prononcé le 1er octobre dernier et a jugé que le consentement aux cookies doit être effectivement donné par l’internaute et ne peut résulter d’une case de consentement pré-cochée.

L’étendue des pouvoirs de la CNIL pourrait s’avérer difficile à gérer dans le cadre de ses relations avec les acteurs économiques et les citoyens, puisqu’elle dispose à la fois de pouvoirs de concertation, du pouvoir d’éditer des règles contraignantes, de contrôler et de prononcer des sanctions particulièrement lourdes. Le risque pour la CNIL est de mécontenter tout le monde, puisque ses décisions récentes sur les cookies ont fait l’objet de recours de la part d’associations de protection des citoyens mais également de la part des professionnels. https://www.nextinpact.com/news/108249-consentement-aux-cookies-pros-pub-defendent-leur-vision-devant-cnil.htm

Pour les internautes enfin, la situation n’est pas claire : s’ils adressent aujourd’hui une réclamation à la CNIL à l’encontre d’un site, la CNIL ne sanctionnera pas le responsable de traitement s’il n’y a pas d’atteinte particulièrement grave.

Tout ceci pourrait donc inciter les internautes à saisir le juge, et les associations à délaisser la voie des réclamations auprès de la CNIL au profit d’actions de groupes… ce que redoutent les responsables de traitement.

Une seule chose est sûre : le « feuilleton » est loin d’être terminé… et pendant que le "feuilleton" continue, les professionnels doivent se préparer à mettre en place des cookies et traceurs conformes aux règles au plus tard à l’expiration de la période de transition.


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