Hélène Lebon, avocat à Paris 8

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Hélène LEBON
Avocat au Barreau de Paris
 

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Politique des cadeaux et invitations : ce n'est pas tous les jours Noël!


Si les cadeaux et invitations font partie des actes ordinaires de la vie des affaires, tout est affaire de circonstances pour ne pas sombrer dans les délits de corruption ou de trafic d’influence. C’est ce que l’AFA[1] nous rappelle dans son « Guide pratique de la politique des cadeaux et invitations[2] » : car la frontière est floue tant que les règles ne sont pas claires !

En effet, l’offre ou l’acceptation d’un cadeau ou invitation peut, dans certaines circonstances constituer un acte de corruption « lorsqu’elle a pour finalité de déterminer l’accomplissement ou le non-accomplissement d’un acte par une personne, en méconnaissance de ses obligations légales, contractuelles ou professionnelles »[3]. La corruption ou le trafic d’influence peuvent être actifs ou passifs, que l’on offre ou que l’on reçoive lesdits cadeaux.

  1. Elaborer une cartographie des risques

Certaines pratiques constituent donc des risques qu’il convient d’identifier rapidement et de gérer efficacement.

Pour l’AFA, la cartographie des risques est une étape indispensable à laquelle l’organisation devra s’astreindre pour identifier, évaluer, hiérarchiser et gérer les risques inhérents à ses activités, son implantation géographique et les processus ou fonctions à risque.  Rappelons que ce document doit pouvoir être « présenté, expliqué et documenté lors d’un contrôle de l’AFA[4] ». A noter que l’AFA a procédé en 2020 à 29 nouveaux contrôles d’initiative (19 dans le secteur économique et 10 dans le secteur public).

De cette cartographie naitra une politique des cadeaux et invitations permettant d’organiser et de maitriser les risques.

  1. Une politique claire
  • Les personnes concernées

L’AFA rappelle que la politique des cadeaux et invitations s’applique à toutes les personnes exerçant leurs fonctions au sein de l’organisation qu’ils soient mandataires sociaux, salariés (et le cas échéant, agents de droit public) ou encore collaborateurs occasionnels (intérimaires, stagiaires, bénévoles…). Mais les tiers ne sont pas en reste puisqu’il est recommandé d’intégrer aux documents relatifs aux dispositions applicables aux fournisseurs ou intermédiaires, des éléments de la politique cadeaux et invitations afin de les inviter à les respecter contractuellement. Cette recommandation est majeure car elle éradiquera dans l’œuf les tentatives malencontreuses.

  • Les règles applicables

Sur la forme : Les organisations peuvent faire le choix d’interdire tout simplement les cadeaux et invitations ou de les accepter mais en encadrant cette pratique afin de maitriser son risque. Et la rigueur n’exclut pas la souplesse : il est possible de poser des règles différentes entre les cadeaux, les invitations, les hospitalités culturelles et sportives ou les filiales à l’étranger dont les usages locaux peuvent être différents…Il faut cependant que les règles soient précises mais surtout illustrées afin d’être bien comprises. Le sens pratique et concret est de rigueur.

Sur le fond : L’AFA préconise aux organisations (à l’instar du travail des magistrats saisis de faits de corruption présumés), de se fonder sur un faisceau d’indices pour élaborer sa politique : la finalité, la valeur et la fréquence des cadeaux ou invitations sont les principaux critères d’appréciation.

Au-delà de savoir si le bénéficiaire du cadeau doit apprécier seul s’il accepte la faveur ou après en avoir reçu l’autorisation par son supérieur hiérarchique, l’AFA, dans son guide interpelle de manière générale sur le fait qu’il faut s’interroger face à ce type d’actions. En effet, rien n’est purement désintéressé dans la vie des affaires. Une certaine déontologie ou de simples bonnes pratiques ou réflexes (mutualiser les cadeaux, éditer un registre…) sont les premiers garants contre un glissement vers la sphère pénale… que ce soit par négligence, ignorance ou mauvaise foi.

Pour autant, une politique des cadeaux et invitations n’est pas une action isolée. Elle doit se combiner et s’articuler avec d’autres actes ou politiques souvent préexistantes comme un « guide de bonne conduite », une politique des notes de frais ou des procédures liées au mécénat et sponsoring… l’interdépendance et la cohérence de ce bloc doivent être posés et clairement déterminés.

  1. Une politique assumée et contrôlée

Et la seule façon pour que chacun sache où placer le curseur allant de « l’acceptable » au « rejet le plus vif », est l’édiction de règles claires… et connues de tous ! Connaitre, former et contrôler sont les maitres mots d’une politique efficace.

Une large communication auprès des membres de l’organisation via tous les moyens à disposition est indispensable pour que le message soit entendu tant par les salariés que par les tiers, fournisseurs, intermédiaires… le doute ne doit pas persister !

La formation des personnels les plus sensibles ou exposés est également indispensable.

Mais une mesure ou une politique qui ne se dote pas de procédures de contrôles et d’indicateurs fiables serait vouée à l’échec. L’AFA préconise alors des contrôles hiérarchiques, comptables ou des audits. Reste à espérer que ces contrôles seront effectifs et réguliers … tout dépendra de la volonté des dirigeants à vouloir un changement des pratiques et imposer un cadre un peu plus strict.

 

Virginie LE DRESSAY

 

[1] Agence Française Anticorruption

[2] AFA – guide pratique de la politique des cadeaux et invitations dans les entreprises, EPIC, associations et Fondations - 2020

[3] Article 445-1 du code pénal

[4] AFA – cartographie des risques de corruption – sept. 2018


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